[...]
I. - La présomption de compétence professionnelle que les arbitres font peser sur les opérateurs du commerce international a été soulignée dans cette chronique dès 1974, dans des observations sur la sentence rendue en 1972 dans l'affaire nº 1990 (JDI 1974, 897). Elle apparaissait déjà dans une sentence de 1966 dans l'affaire nº 1397, mentionnée dans les observations figurant au pied de cette sentence. Cette présomption a été confirmée par diverses sentences ultérieures (cf. les sentences rendues en 1975 dans les affaires nº 2438 : JDI 1976, p. 969 ; nº 2281, p. 989 et en 1980 dans les affaires nº 3380 : JDI 1981, p. 927 et nº 3130, p. 932).
Une fois encore les arbitres présument que les parties n'ont pu en raison de leur expérience, se méprendre sur la portée de leurs engagements contractuels. Ils estiment qu'il ne fait pas de doute qu'elles ont prêté une grande attention à la lettre de leur contrat. Mais tel n'est pas le seul rôle de la présomption de compétence professionnelle des opérateurs du commerce international. Elle constitue le support d'une référence des arbitres à la pratique et aux usages que des parties expérimentées ne sauraient ignorer. On ne peut s'empêcher ici d'évoquer l'article 9 (2) de la Convention de Vienne du 11 avril 1980 qui dispose :
« Sauf convention contraire des parties, celles-ci sont réputées s'être tacitement référées dans le contrat et pour sa formation à tout usage dont elles avaient connaissance ou auraient dû avoir connaissance et qui, dans le commerce international, est largement connu et régulièrement observé par les parties à des contrats de même type dans la branche commerciale considérée ».
En effet, non seulement le tribunal arbitral présume que les parties ont rédigé leur contrat avec le plus grand soin, mais il tient pour certain qu'elles dominent parfaitement la technique contractuelle en matière de construction. C'est pourquoi les arbitres ne peuvent admettre que le doublement de la capacité de production de la fabrique de ciment puisse être considérée comme une addition aux travaux contractuels qui étaient l'objet du premier contrat avec le maître de l'ouvrage et, partant, la raison d'être de la constitution du premier consortium. Au-delà d'un usage du commerce international tendant à la sécurité des transactions, la présomption de compétence professionnelle des opérateurs du commerce international apparaît ici comme un point d'ancrage au sein des usages du commerce international.
[...]